La tradition du portage

Les origines du porte-bébé

 
 
 
 

Je suis Anaïs Antonio,

créatrice de lafondamentale


Les informations qui figurent dans ce sujet ont été glanées auprès de nombreux articles cités en fin de chaque paragraphe, et parus sur la thématique au cours des dernières années.

Ils ont été remaniés, enrichis et parfois traduits par lafondamentale.


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Temps de lecture du sujet : 18min


Le porte-bébé, un moteur de l’ Évolution

 

Le porte-bébé, l’un des tous premiers objets de l’Homme — sans doute inventé par la femme — et conçu pour un usage quotidien, répond à un besoin primaire ; celui de permettre la proximité d’une mère et de son bébé, afin d’en assurer la survie et le développement au travers des époques et des modes de vie.

En effet, depuis le début de l’Humanité, le portage des bébés ne nous raconte pas seulement les usages de la maternité. Il nous raconte avant tout, l’histoire de l’Évolution de l'homme qui selon Timothy Taylor, spécialiste de la préhistoire, concevra avec l’invention du bandeau porte-bébé (le babysling), un véritable moteur de son Évolution afin lui permettre le déplacement — le nomadisme de nos ancêtres qui vivaient de la chasse et de la cueillette au gré des saisons — et la survie, évitant ainsi à sa progéniture, les dangers présents au sol, le froid et les éventuelles attaques des prédateurs.

lafondamentale vous retrace ici l’histoire d’un des objets les plus vieux du monde : le porte-bébé dont l’histoire et l’évolution mérite intérêt et attention.


> Extraits de l’article “Le portage bébé, un effet de mode” par le 28 septembre 2018 sur le blog lesptitssages.com

> Extraits de l’article “L'histoire du portage et de la poussette” paru le 28 novembre 2017 sur le blog josette-la-chouette.fr


 
 

L’Évolution de l’Homme

Dans l’histoire de l’Évolution de l’Homme, lorsque les femelles ont commencé à se déplacer debout, elles ont rapidement été confrontées à un problème : comment porter son bébé afin de le protéger des prédateurs, se déplacer aisément mais également poursuivre ses activités domestiques (cueillettes, etc).

Car bien que l’homme eut adopté la position debout, leurs enfants ne peuvent pourtant plus s’agripper aux dos des femelles comme ils le faisaient lors de la position à quatre pattes ; une alternative au portage à bras (réduisant la mobilité) a ainsi du être inventer.

Heureusement, bien que l'Homme ait perdu ses poils de singe, l’on remarque que le nourrisson conserve ses réflexes primaires du grapping (préhension de la main) et de Moro (réflexe d’agrippement des bras et des jambes).

C’est ainsi que serait apparu les premiers porte-bébés, fabriqués à base de peaux ou de viscères d’animaux.


> Extraits de l’article “L’Histoire du portage” publié le 30 mai 2015 sur le blog Mon BB Porté

> Extraits de l’article “Les réflexes du nouveau-né” publié en octobre 2020

 
 
 
 

Une mère Comanche, Edward S. Curtis, 1927

Le tribu des Kombai en Papouasie Nouvelle Guinée

Une femme et son fils, île de Java

 
 

Anthropologie & Biologie de l’enfant

Dans la plupart des cultures historiques des Plaines, les parents d'une nouvelle mère fabriquaient un berceau pour le bébé. Les panneaux perlés complexes et colorés de cet exemple font partie des conceptions traditionnelles Kiowa créées par les femmes, bien que de nombreuses tribus aient préféré les cadres peints et cloutés en laiton produits par les hommes. Le berceau permettait de porter le bébé sur le dos de la mère, de le suspendre à sa selle ou de l'appuyer contre le tipi. Celui-ci montre une utilisation considérable : les générations précédentes l'ont probablement transmis.

Louise Smoky, une Kiowa, dans un berceau. collection Charles H. Stephens; Image du musée de Penn

Un enfant amérindien dans son porte-bébé

 

Pourquoi portons-nous nos bébés ?

Du point de vue des anthropologues, le cerveau du bébé humain est immature et ne représente à la naissance que 25% de la taille adulte. Il double à l’âge de 2 ans et représente 90% de son format à l’âge de 3 ans. Il faudrait donc 18 mois de gestation pour avoir la maturité cérébrale d’un primate.

Le volume du bébé se serait donc développé trop rapidement alors que le bassin de la femme serait resté étroit afin de pouvoir se tenir debout toute la journée.

Afin de prévenir ce problème mécanique, les bébés humains naissent ainsi immatures d’une année environ, et vont continuer leur croissance dans les bras de leur mère.

Ainsi, du point de vue du biologiste allemand Dr Hassenstein, les bébés sont programmés pour être portés.

Il établi 3 catégories cliniques :

  • Les bébés nidicoles : qui ont les yeux et les conduits auditifs fermés. Incapables de se déplacer, ils restent dans le nid, calmes, et attendent que leurs parents viennent les nourrir. Ils tètent un lait riche en calories qui les rassasie pendant de longues durées.

  • Les bébés nidifuges : qui ont les yeux et conduits auditifs ouverts. Ces bébés se déplacent par leurs propres moyens tout en restant, en permanence, à proximité de leurs parents. Ces bébés tètent un lait qui les rassasie pour de courtes durées.

  • Les bébés portés : qui ont les yeux et conduits auditifs ouverts mais ne se déplacent pas. Ceux-là réclament le contact, la présence permanente de la mère et sont programmés pour être portés en s’agrippant (les portés actifs) ou en étant dans une poche (les portés passifs). Les tétées sont rapprochées.

Le bébé humain fait partie de la catégorie des portés passifs, qui participent activement au portage puisque les bébés humains sont programmés pour s’accrocher avec leurs mains et leurs pieds au corps de l’adulte qui lui offrent les appuis et le soutien nécessaires.

Porté régulièrement par la base dès sa naissance, le bébé exerce ainsi ses compétences d’agrippement et adopte sa position physiologique : il remonte ses genoux contre le ventre, s’accroupi et arrondi le dos.

 
 

Le portage chez les sociétés autochtones

  • Une idée faussement reçue réside dans le fait que dans les pays d’Afrique, le bébé est porté 24h/24h par sa mère. Toutefois, selon les études, le portage du bébé ne représente en réalité que peu de temps.

    Par exemple : pour un bébé de 2 mois, la durée maximale de portage dans le dos ou dans le creux des reins (à l’aide d’un pagne) est inférieure à 7h par jour. Ensuite, la durée de portage diminue progressivement; elle est de moins de 3h par jour pour un bébé de 1 an. En fait le bébé est souvent dans les bras, allaité, câliné, massé et finalement mis dans un morceau de tissus lorsque la mère a besoin d’avoir les mains libres, ou que l’enfant dort.

    On comprend alors que bien que l’invention du porte-bébé est eu lieu dans le but de suivre le rythme de la mère, la durée de portage dans la journée est en réalité adaptée par la mère en fonction de l’évolution du bébé et notamment du rythme de son sommeil. (voir l’ouvrage : “Porter mon bébé” de Cécile Cortet et Céline Guerrand-Frénais)

    Le bébé est ainsi porté pendant un cycle de sommeil qui peut durer de 20min à 40min, puis ensuite on le sort pour le nourrir, pour jouer avec lui etc. Selon les ethnologues, les enfants en Afrique sont ainsi portés sur des périodes assez courtes et ils sont sortis fréquemment.

    Le bébé est porté sur le coté lorsqu’il est éveillé et sur le dos lorsqu’il dort. La manière de porter le bébé sur le ventre comme on fait en occident vient du fait qu’on a toujours un peu besoin d’avoir un œil sur le bébé et aussi du fait que nous avons perdus la tradition du portage.

    Nous essayons de la retrouver petit à petit avec ce contact “frontal”… Cette façon de porter un enfant n’a été trouvé nulle part ailleurs dans les cultures traditionnelles.

  • Une planche porte-bébé est un dispositif traditionnellement utilisé par les peuples autochtones pour maintenir le nourrisson en place (plus ou moins au cours de sa première année) pendant que ses parents se déplacent, travaillent ou sont occupés d’une quelconque manière.

    Le nourrisson est attaché à une fine planche rectangulaire et enveloppé dans une couverture qui lui assure confort et chaleur. La conception de la planche permet d’éviter que l’enfant ne se blesse, même en cas de chute.

    Dans de nombreux modèles de planches porte-bébé, le haut est muni d’un cerceau ou d’un arc pour protéger la tête de l’enfant. Certains modèles comportent également un repose-pieds pour que le bébé ne tombe pas par le fond.

    La forme exacte varie d’un groupe à l’autre dans toute l’Amérique du Nord. Beaucoup de temps et d’efforts sont consacrés à la décoration de la planche porte-bébé et de ses accessoires. La plupart des planches porte-bébé sont décorées de sculptures et de peintures chargées de significations. Les couvertures qui enveloppent les nourrissons sont également ornées de motifs perlés et cousus.

    La planche porte-bébé offre également l’avantage de permettre à l’enfant d’observer tranquillement la nature et la routine quotidienne de ceux qui l’entourent. Dans de nombreuses cultures autochtones, l’observation fait partie intégrante de l’apprentissage de la patience et de la pleine conscience.

    Les Inuits du Grand Nord, eux, placent bébé au dos, dans un manteau très chaud et spécialement conçu pour le portage, appelé un Amauti.

  • Au Pérou comme en Bolivie, les femmes portent les bébés dans une sorte de couverture en laine colorée. Elle se noue comme un châle sur les épaules de la maman. L’enfant est alors à la verticale dans le dos.

    Dans la culture mexicaine, les parents transportent leurs enfants sur leur dos, dans une pièce de tissu nouée à l’épaule, appelée Rebozo.

    Les péruviens porte bébé au dos, dans un châle que l’on nomme Manta.

  • Au Japon, en Corée, au Laos, en Chine et dans d’autres pays asiatiques, les bébés sont souvent portés dans le dos de leurs mères à l’aide de très beaux porte-bébés richement décorés, dont les couleurs et motifs ont une signification précise (vœux de bonheur ou de protection pour le bébé, histoire de sa naissance...).

    En Corée, il s'agit cette fois d'un rectangle de tissu à deux longues lanières rembourrées. Il nécessite un nouage un peu plus complexe que le porte-bébé chinois. C'est un dérivé du podéagicoréen qui est en fait un véritable vêtement couvrant la mère et l'enfant.

    Le bébé au Népal est couché dans un berceau en bambou que la mère porte sur sa tête à l'aide d'une lanière.

    En Chine, il s'agit d'un carré de tissu, servant de support au corps de l'enfant, et possédant 4 lanières permettant de nouer celui-ci. Le porte-bébé chinois est essentiellement utilisé en Chine pour porter l'enfant dans le dos.

    Pour finir, en Inde, les bébés sont allongés dans des hamacs faits de tissus épais et accrochés à un grand bâton que les mères portent à bout de bras ou sur l’épaule.

 
 

Une mère Dinka et son enfant , Soudan

 

N/C


> Extraits de l’article sur la “Planche porte-bébé” sur l’Encyclopédie canadienne


 
 

« Du froid extrême auquel sont soumis les Inuits aux températures caniculaires dans lesquelles vivent les Touaregs, le bébé porté contre sa mère est ensuite protégé de l’extérieur par l’amauti dans le premier cas ou par la djellaba dans l’autre. »
 
 

L’évolution du portage dans l’Histoire du Monde Occidental

Au Moyen-Âge, le lien mère-enfant est valorisé dans la culture comme dans les images religieuses. Les bébés sont plus allaités et portés que dans d’autres périodes de l’histoire, notamment que sous l’Ancien Régime où la mortalité infantile était beaucoup plus forte qu’à l’époque de l’amour courtois. Les bébés partagent également la couche parentale.

Jusqu'à la fin de la renaissance les bébés sont donc portés et vivent dans la proximité de la cellule familiale.

  • La manière d'allaiter les bébés se modifie car la mise en nourrice (à l’origine : femme qui nourrit, garde et élève des enfants en bas âge, des nourrissons) modifie les comportements et éloigne l’enfant de sa mère. Les familles les plus riches font usage de leurs esclaves qui viennent d’enfanter ou emploient des jeunes mères paysannes à moindre coût en les hébergeant avec ou sans leur bébé. On les nomme "nourrices sur lieu".

    Les familles les moins aisées envoient leurs bébés chez les nourrices directement, on les nomme "nourrice à emporter". Avoir du personnel domestique est un signe extérieur de richesse alors lorsque les familles ont les moyens, elles embauchent aussi une bonne en plus de la nourrice pour s'occuper des tout-petits.

    Ces nouvelles pratiques éloignent les bébés de la proximité maternelle et du XVIII ème siècle aux années 1970, on va se diriger vers moins proximité avec son bébé et donc moins de portage.

  • À partir du XVIII siècle, le siècle se divise.

    D'une part, on s'intéresse à la psychologie de l'enfant et de nombreuses recherches sont publiées. On voit apparaître toutes sortes de recommandations pour s'occuper de son bébé (l'invention des horaires pour nourrir/allaiter un enfant sur l'observation du cycle de digestion animal par exemple).

    Le système médical devient de plus en plus présent et prône l'allaitement maternel considérant les nourrices dépourvues d'hygiènes et ignorantes. Des auteurs et philosophes comme Balzac et Maupassant s'insurgent dans leurs ouvrages contre le "marché des nourrices" devenu une véritable industrie. Dans son livre "Émile ou de l'éducation", Rousseau prône le retour à la nature et le lien mère-enfant.

    D'autres part, On crée des infrastructures pour encadrer et organiser les nourrices. Toutes les classes de la société recourent à ce mode d'allaitement. On confie ses enfants "aux nourrices", "à un proche", ou on "les place en internat". (En 1780 à Paris , sur les 21 000 enfants nés cette année-là, seuls 1 000 enfants sont nourris par leur mère.)

    On incite les familles à faire dormir leurs bébés dans un berceau. L’arrêt du sommeil partagé, la diminution de l'allaitement maternel chez les mères et le fait de ne plus avoir d'enfant sur soi conduisent à l'augmentation du taux de natalité ! (Notez aussi qu'à l'époque la figure de mère est sacrée, elle ne peut accomplir son devoir d'épouse pendant son devoir de mère allaitante, alors si elle ne donne pas le sein, le mari peut réclamer ses droits).

    C’est dans ce contexte qu’en 1733, William Kent invente l'ancêtre de la poussette.

  • Ce siècle marque l'éloignement des nourrissons et des enfants de leurs parents.

    La révolution industrielle conduit les mères à travailler avec de moins en moins de temps pour s'occuper de leurs bébés. La transmission de la maternité entre les mères et leurs filles se perd. C'est dans la presse féminine et auprès des médecins que les nouvelles mamans cherchent conseils. On encourage alors les enfants a être autonome très tôt par idéologie éducative et par nécessité. L'accouchement se déroule encore à la maison.

    En 1848 est inventé le lait en poudre. Il est d'abord réservés aux familles pauvres dont les femmes travaillent. Les femmes bourgeoises ayant un peu plus accès à l'éducation que les autres remarquent que le taux de mortalité des nourrissons est assez élevé, c'est l'une des raisons pour lesquelles elles préfèrent garder les nourrices à l’œil en leurs demeures.

    En 1859, Louis de Bonald explique que "l'allaitement est une fonction trop animale pour une dame de qualité. »

    En 1877 : après le constat d'une mortalité infantile très importante, on crée la loi Roussel “ Tout enfant, âgé de moins de deux ans, qui est placé moyennant salaire (notons la précision) en nourrice, en sevrage ou en garde hors du domicile de ses parents, devient, par ce fait, l'objet d'une surveillance de l'autorité publique, ayant pour but de protéger sa vie et sa santé.“ Parallèlement l'utilisation du lait infantile augmente les chances de survie des nourrissons. Ces deux occurrences conduisent les nourrices au déclin.

    L’apparition du landau profite à toutes les couches de la société et renforce la perte de contact entre la mère et son nourrisson.

    Vers les années 1950, l’accouchement à l’hôpital se systématise. L’apparition de produits de puériculture (poussette, chaise haute, transat de bains) et de lait infantile change radicalement les rapports.

    En Amérique du Nord, c’est principalement depuis le début des années 2000 que le portage a réellement pris son envol, alors qu’en Europe le portage (en écharpe, introduit par Didymos) est transmis depuis le début des années 1960.

 

Doolittle; Montrose, PA circa 1890

Une esclave brésilienne porte le bébé de son maître à la manière traditionnelle africaine, Bahia, Brésil, 1880 - Alberto Henschel (1827–1882) / Les noirs dans la photographie brésilienne du XIXe siècle. Rio de Janeiro: George Ermakoff Casa Editorial, 2004, Fundação Joaquim Nabuco, Recife.

 

This woman was a paid wet nurse, after the time when slavery was abolished. As many black women suffered loss of their infants, lactation would give them the ability to work in this way.

Femme noire tenant un enfant

Antônio da Costa Pinto avec sa nourrice-esclave, brésil, ca 1800

Woman with child holding doll, South Carolina, 1905

American White man with daughter and slave nanny, ca. 1845-1850

CDV d'une esclave bien habillée tenant un bébé sur ses genoux, "T.M. Schleier, Nashville, Tennessee."

 

 

Vélez Rubio, province d'Almeria, Andalousie, durant la guerre civile espagnole, 1937 - Photographie de Kati Horna

Le portage en Norvège vers 1900

Poussette en rotin

Poussette en plastique, 14 août 1947

Baby carrier for couples - Jack Milford - 1937

Welsh Family waiting for visiting King George V 1935

 
 
 

Photo by Wilfred Revelle Jackson 1970

Lynne McLellan and bay Tascha. Photo by Revelle Jackson date unspecified.

Communauté hippie au Danemark - source

 

Le tournant des années 1970

Le biologiste allemand et un comportementaliste allemand Bernhard Hassenstein introduit le terme du « primate porté » dans la biologie comportementale.

Alors que l’on considère que le portage est réservé aux pauvres et aux cultures non-occidentales civilisées, en 1979 dans un hôpital de Bogota, en Colombie où par manque de couveuses, on décide de positionner les prématurés contre la peau nue de leurs mères, les résultats démontrent que cette méthode réduit la mortalité, la durée de l’hospitalisation, les infections, permet une meilleure stabilité respiratoire, une meilleure stabilité du sommeil ainsi qu’une meilleure régulation de la température du bébé.

La méthode alors baptisée « kangourou » se répand dans les hôpitaux au delà de la Colombie et l’on se réintéresse aux bienfaits du portage en terme de santé et de développement de l’enfant.

C’est en Allemagne qu’Erika Hoffman, mère de Jumelles, développe l’écharpe de portage que nous connaissons aujourd’hui en s’inspirant de méthodes Mexicaines.

Petit à petit, l’écharpe de portage se développe en Europe, puis apparaissent les porte-bébés.


Les années 1990

Les professionnels s’intéressent et se forment au portage. On lui associe de nouvelles caractéristiques qui ne sont pas des objectifs de transports.

Le test de Harlow a démontré le besoin primaire de contact physique des nouveaux-nés. On sait que les contacts fréquents et les interactions enfants/adultes sont indispensables à une croissance optimale du cerveau.

Le portage apaise les pleurs, les coliques, facilite la digestion et permet d’autres bienfaits que vous pouvez lire ici.


> Extraits de l’excellent article “Vintage Baby Carriers” du blog Hipababy.com

> Extraits de l’excellent article Vintage Baby Carrier Advertisements du blog Hipababy.com

 
 

Au cours des quarante dernières années, plusieurs travaux de recherches, notamment ceux du Dr. Sears, ont permis de démontrer l’importance du contact physique dans le développement du jeune enfant et de son lien d’attachement avec ses parents.

 

Le concept du continuum

À la recherche du bonheur perdu

“Le concept du continuum : à la recherche du bonheur perdu” est un essai de Jean Liedloff (traduit de l'anglais vers le français par Véronique Van den Abeele).

L'auteure s’y oppose aux théories ou pratiques occidentales visant à séparer très tôt le nourrisson de sa mère et cherche à démontrer la nécessité de conserver le contact physique mère-enfant jusqu'à ce que l'enfant s'en détache seul.

  • Son principal argument est qu'un nourrisson qui passe neuf mois au contact permanent avec sa mère ne peut être lui enlevé du jour au lendemain.

    Au lieu d'isoler l'enfant dans une chambre et un lit à part, sans contact avec un autre être vivant, Jean Liedloff propose de le laisser partager la vie de la mère tant qu'il le réclame.

    En effet, selon elle, lorsqu'il vient au monde, l'enfant a besoin d'être rassuré sur sa propre existence et sur l'amour qu'il reçoit. Sans être capable de conceptualiser ce besoin, il ressent l'absolue nécessité d'être entouré à chaque instant comme il l'était dans le ventre de sa mère.

    L'auteure conseille la mère de porter constamment son enfant pour qu'il découvre le monde à travers elle et appréhende ce qui l'entoure en toute sécurité. Lorsqu'il aura suffisamment confiance en ses propres capacités, il la quittera de lui-même pour explorer son environnement, tout en sachant à chaque instant qu'il peut revenir vers elle s'il en ressent le besoin.

    L'auteure fonde principalement sa démonstration sur le témoignage de son vécu dans la jungle amazonienne au contact de tribus (les Yekwanas et les Sanemas) dont elle a trouvé les membres particulièrement épanouis et heureux.

 
 

Kurdish Herke Cecim Baby Backs Antique

Le point de vue du porteur

Pour les mamans, il semble que le portage contribue à réduire les risques de dépression du post-partum, la mère se sentant alors forcément moins à l’écart.

La présence sur soi du bébé faciliterait la pratique de l’allaitement, à la fois par la proximité qui permet une réponse plus adaptée de la mère et par le contact qui facilite l'expression des compétences du nourrisson et la sécrétion des hormones. Par ailleurs, les écharpes ou sling peuvent être utilisés pour placer confortablement l’enfant en position d’allaitement.

Pour les papas, l’un des principaux avantages du portage est de leur permettre un contact physique et privilégié avec leur enfant.

Il est à noter que le développement du portage en Occident a coïncidé avec l’accroissement du rôle du père auprès du nouveau-né alors même que la communication associative ou commerciale sur le portage exclut encore largement les pères.


  • Selon le type de portage utilisé (peau à peau ou par dessus les vêtements, sur le ventre ou le dos, etc), plusieurs avantages peuvent être mis en avant :

    En peau à peau, l’enfant est à température idéale, aux environs de 37 °C, quelle que soit la température ambiante.

    On constate une diminution des pleurs de 50% en temps normal, et 85% lors des procédures médicales douloureuses (prélèvements sanguins, vaccins).

    Le caractère social du bébé est encouragé, les sourires-réponses et les babillage apparaissant quelques semaines plus tôt. En effet, l'enfant est stimulé de manière continue et en douceur.

    Le développement de l'attachement entre le porteur et l'enfant se fait plus facilement, le contact physique est mieux supporté par l'enfant.

    Il respecte la cambrure naturelle de la colonne vertébrale de l'enfant, à la condition que le portage soit dit "physiologique", c'est-à-dire qu'il soit assis comme sur un hamac, et non soutenu par l'entrejambe. Certains modes de portage permettraient aussi de lutter efficacement contre la dysplasie de la hanche des nouveau-nés, en particulier les portages qui permettent de porter le bébé sur le côté.

    Le portage a également un aspect pratique: il libère les bras du porteur, qui peut alors vaquer à ses occupations ou à ses déplacement sans pour autant laisser le bébé seul.

    C'est agréable, à la fois pour le porteur et le porté;

    Le nouveau-né retrouve la chaleur, l'odeur, la voix de sa mère, tout ce qui l'a accompagné pendant la grossesse;

    La mère y trouve le plaisir du peau à peau, le plaisir animal de sentir son tout-petit contre soi;

    Le père peut aussi éprouver ces sensations, puissant moyen d'attachement, dans une société où l'on s'efforce souvent d'éviter les contacts physiques;

    Remède souverain contre les coliques (testez-le si vous avez des doutes...);

    Calme les peines et douleurs mystérieuses des premiers mois;

    Aide l'enfant à s'endormir (mieux que de le laisser pleurer).

    Plus de problèmes dus à l'encombrement d'une poussette;

    Faire ses courses, son ménage, toutes les tâches de la vie quotidienne sans perturber l’enfant qui est bienheureux dans son écharpe au chaud contre son parent;

    Facile de faire les tétés en toute discrétion dans n'importe quelle circonstance.

  • En occident, le portage est source de questionnement comme tout ce qui est relié à la famille, à l’éducation, à l’intime.

    Pour les uns, on craint que porter son enfant reflète un manque d’autorité, ne favorise pas son autonomie ou lui donne de mauvaises habitudes. Le caractère parfois militant et fusionnel du portage rebute certaines femmes associant l’environnement du portage à une prison maternelle retirant cette liberté si durement acquise et si récente.

    Pour les autres, en rejet d’une éducation forgée sur la réprimande, la sanction violente et en désaccord avec la philosophie du “laisser pleurer les bébés” , on recherche de nouvelles propositions éducatives dans l’empathie et l’on se tourne vers le portage qui propose des valeurs à la hauteur du bien-être des bébés, des possibles promesses de grandir mieux, plus épanoui et non à la hauteur des exigences de l’adulte et de la société.

    Les critiques font valoir que l’apprentissage de la capacité à trouver un sommeil autonome est d’autant retardé. Mais d'autres pensent qu'en étant porté, l’enfant participe à la vie quotidienne, ce qui semble le rassurer. Constamment bercé, il serait plus calme que dans un lit immobile.

    Il n'y a aucun inconvénient clair et direct à porter son enfant. Néanmoins, dans certains cas, il est nécessaire de faire preuve de discernement et de ne pas s'enfermer dans une idée.

    Bien que cela soit discuté, et discutable, il doit être dit que dans certains cas, le portage peut renforcer l'aspect fusionnel de la relation de l'enfant à la personne qui le porte. Lorsque cet aspect fusionnel, s'il est vécu comme excessif, devient problématique, l'honnêteté pousse à reconnaître que le portage peut être une des causes du problème.

    Le caractère militant du choix du portage, comme celui de l'allaitement prolongé, par exemple, peut conduire à confondre le choix de ce qui est bon pour son enfant, avec la revendication de ce que l'on pose bon parce que ce n'est pas la norme sociale, mais une manière de s'y opposer.

 
 

Fritz Fenzel snapped this very clean side carrier in Germany

In the caption of John Everard's photo, this umbrella-toting dad from Luzon, Philippines is described as a headhunter. Which means he's Bontoc, the one Igorot group which actually practiced headhunting

A Spanish peasant rocking a suit and a smooth, waist-level baby carrier - photo by Fulvio Roiter

 
 

Les différentes méthodes de portage


Le portage se développe en Occident depuis les années 1970, en lien avec une évolution de la façon de s'occuper des bébés, un regain pour le maternage et la proximité mère-enfant.

De nombreux systèmes existent :

  • Les écharpes (ou foulard), qui sont des bandes de tissu, larges d'environ 70 cm, et longues de 2 à 7 mètres, élastiques ou non, qui permettent de porter sur le devant, le côté ou le dos, selon le nœud utilisé et l'âge du bébé.

    C'est le type de portage le plus polyvalent et ancien, bien que le portage traditionnel se fasse en tissu plutôt court, plutôt tissé et plutôt sur le côté ou le dos.

  • Le sling, une bande de tissu reliée par un double anneau, généralement métallique. Il permet un portage sur le côté et offre une position optimale pour le bébé.

  • Les porte-bébés préformés ou « kangourou », qui s'attachent grâce à des systèmes de sangles et doivent se régler selon la morphologie de l'enfant et du porteur.

  • Les porte-bébés de type asiatique (chinois, mei tai..), un carré de tissu dont 4 bandes sont attachées aux 4 coins; 2 se nouent autour de la taille, et les 2 autres soutiennent l'enfant aux épaules du porteur.

 

Cheyenne mother and children

lafondamentale

Ressources autour de la thématique


Bibliographie


PORTER MON BÉBÉ, Céline Guerrand-Frénais et Cécile Cortet, Éditions Minerva (Genève), 2009, 127 p.

Cet ouvrage propose des données historiques, médicales et théoriques sur le portage ; complétées par une partie pratique avec plusieurs pas à pas sur différents noeuds et des conseils concrets sur le portage.


BÉBÉS DU MONDE, Béatrice Fontanel et Claire d’Harcourt, ÉditIons de La Martiniere, 2009, 280 p.

Bébés papous, bébés pygmées, bébés kabyles, bébés kayapos, bébés sioux, bébés hindous, bébés esquimaux, bébés pékinois, bébés baloutches… Comment vivent les petits d’homme à l’autre bout du monde ?

Pourquoi les mères touaregs mettent-elles des crottes de chameaux dans le premier bain de leur nouveau-né ? Quelles vertus thérapeutiques et magiques sont attribuées aux fumigations que subissent les bébés aborigènes ?


Les bienfaits du portage, revue Allaiter Aujourd'hui n°40 par la lllfrance.org

BELOVED BURDEN, BABYWEARING AROUND THE WORLD, I.C. van Hout, Editions Lm Publ (livre en anglais), 2015, 176 p.

Les recherches confirment que porter un bébé développe son intelligence et sa capacité de confiance, d'affection, d'intimité, d'amour et de bonheur.

Ce livre décrit comment les nourrissons sont portés dans différentes parties du monde. Il présente une vision historique de l'utilisation des porte-bébés, de l'Antiquité à nos jours.


PORTER BÉBÉ , AVANTAGES ET BIENFAITS, Claude-Suzanne Didierjean-Jouveau, Éditions Jouvence, 2006, 120 p.

Premier livre français sur le sujet, l’ouvrage, nourri d’études et de l’expérience de parents, aborde l’historique du portage, ses multiples bienfaits (confort, lien mère-enfant, développement psychomoteur…) et la façon dont il facilite la vie quotidienne.


LA MÉTHODE KANGOUROU, Nathalie Charpak, Zita de Calume, Annick Hamel, Éditions Esf, 1996, 112 p.

Introduction à cette technique médicale, qui permet aux prématurés de vivre hors de la couveuse grâce au contact peau à peau avec leur mère.


HISTOIRE DU BRÉSIL, Armelle Enders, Édititions Chandeigne, Collection Série lusitane, 2016, 360 p.

Pour rompre avec la linéarité du récit national du Brésil, ce livre insiste sur la diversité et les contradictions de la société coloniale, puis du Brésil indépendant. Il rappelle le rôle central qu'exercèrent Portugais et Brésiliens pendant toute la durée de la traite négrière occidentale, le fonctionnement du système esclavagiste, ainsi que les séquelles de longue durée que fait peser celui-ci sur les rapports sociaux et la citoyenneté au Brésil.

Il s'efforce, enfin, de faire l'archéologie du "Brésil métis", en plaçant dans son contexte le métissage, ses formes, ses significations et ses enjeux.


L’ÉPOPÉE DES BÉBÉS DE L’ANTIQUITÉ À NOS JOURS, Béatrice Fontanel et Claire d’Harcourt, Éditions de La Martinière, 1999, 222 p.

Ce livre suit l'évolution des soins donnés aux tout petits dans cette première "Histoire des bébés" de l'Antiquité à nos jours. Le premier grand album d'images de la vie quotidienne des petits d'hommes au fil des siècles.